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Vegan pour l'amour des animaux

Mercredi 28 Juin 2017

Suite aux scandales causés par la diffusion de vidéos choquantes sur les conditions de vie en abattoir, beaucoup s’interrogent sur leurs habitudes alimentaires. Dans ce contexte, le véganisme, variante du végétarisme, en séduit plus d’un. Zoom sur un mode de consommation alternatif, véritable « philosophie de vie » pour ses adeptes, en plein boom avec la naissance de plusieurs adresses spécialisées sur le sujet.


Véganisme ! Voici un nouveau mot, inconnu il y a quelques années et qui a fait son apparition dans le dictionnaire en 2015 ! Mais de quoi s’agit-il ? Le véganisme est un mode de vie alliant une alimentation exclusivement basée de végétaux et le refus de consommer tout produit issu des animaux ou de leur exploitation. Autrement dit, il s’agit d’exclure non seulement la viande et le poisson, mais également les produits laitiers, les œufs ainsi que le miel. Tous produits préalablement testés sur eux comme les cosmétiques ou les médicaments sont également à bannir. Le même régime vaut pour le cuir, la fourrure, la laine, la soie, le cachemire et la cire d'abeille.
Mais d’où vient ce phénomène ? Le terme « vegan » fut créé en 1944 par Donald Watson, le fondateur de la Vegan Society. Cette association caritative, fondée en Angleterre, a pour but de représenter les végétariens ne consommant ni produits laitiers ni œufs pour ainsi faire la distinction avec les différents courants de végétarisme. L'organisation définit ce type de régime comme « une philosophie et un mode de vie qui tend à exclure, autant qu'il est possible, toutes formes d'exploitation et de cruauté faites aux animaux afin de se nourrir, se vêtir ou dans n'importe quel autre but. » Depuis, la journée internationale du véganisme est célébrée chaque année, le 1er novembre, date de la création de la Vegan Society.
Pour une sociologue spécialiste sur le sujet, « ce succès contemporain est en réalité profondément lié à deux sensibilités politiques devenues indissociables. D’une part l’écologie et d’une autre l’altermondialisme. L’écologie, parce qu’elle a amené toute une fraction de mouvements politiques, principalement de gauche, à remettre en question leur rapport à la nature et le problème du productivisme, hérité du marxisme. Et l’altermondialisme, parce qu’il a sorti du silence les aspects profondément inhumains et violents de la mondialisation. »
Pourquoi devient-on vegan ?
Devenir vegan rime bien souvent avec l’adoption d’une philosophie de respect et de protection des animaux. Selon une sociologue spécialisée sur le sujet, « le véganisme serait issu d’une critique philosophique et politique qui refuse toute discrimination au nom de l’espèce». « Ce n’est pas une tendance mais une prise de conscience collective d’une société qui évolue. Il s’agit de vivre dans un monde respectueux de chaque être vivant », témoigne Aryna, jeune Glandoise étudiante en 3e année de philosophie. C’est d’ailleurs ce qui a motivé la famille Azzam d’ouvrir une entreprise familiale végane à Genève. «Je suis devenue végane pour plusieurs raisons. D’abord pour des raisons de santé, ensuite par éthique. De là nous est venue l’idée de créer notre propre fromage à base de noix de cajou. On a développé, testé et modifié des recettes, jusqu’au jour où les résultats furent sans appel », explique Malena, la fille de la famille. Ils ont depuis ouvert leur première crèmerie près de Plainpalais.
Une découverte médicale miracle
Les tentatives d'adoption d'une alimentation végétalienne sont restées très limitées jusqu'à la découverte de la vitamine B12 en 1948. Peu après la fondation de la Vegan Society, l'importance de cette vitamine a été mise en évidence par la recherche scientifique. Au début, les végans peinent à accepter que ce qu'ils perçoivent comme une alimentation morale ne soit pas viable sans complément alimentaire. « Le vegan se met tout seul dans une situation de carence. L’homme en tout temps a mangé des aliments issus de la production animale, ce n’est pas pour rien. Un vegan, à moins de s’y connaître extrêmement bien, ne peut être en bonne santé sans un suivi médical», estime le nutritionniste Valerio Rizzo exerçant à Gland et Préverenges.
Plus récemment, la Société Suisse de Nutrition (l’organisation nationale de référence dans le domaine de l’alimentation), a exprimé dans un communiqué de presse paru en septembre dernier que le régime vegan n’est en aucun cas recommandé au grand public. « En particulier chez certains groupes sensibles de la population comme les enfants, les femmes enceintes ou allaitantes, où il est important de veiller à ce que les besoins en nutriments soient couverts. » En effet, la  vitamine B12,  indispensable  au  système  nerveux, se  trouve uniquement dans les aliments d’origine animale. Ce sont aussi essentiellement eux qui fournissent aux non végétaliens d’autres nutriments, comme le fer, le zinc et le calcium. Pour ces  trois nutriments, il est cependant possible de couvrir les besoins dans le cadre d’une alimentation végétalienne, mais cela nécessite une excellente connaissance de la nutrition et un choix très soigneux de la nourriture.
Une tendance à la hausse
Créé en 2011, la Société végane suisse affirme que 1% de la population helvétique serait végane. Un chiffre invérifiable, mais une tendance indéniable. La preuve en est, les grandes surfaces s’y mettent ! En Suisse, la Coop proposerait plus de «500 produits qui portent le logo officiel de Swissveg, dont 350 qui sont vegan», explique Ramon Gander, porte-parole de la grande surface. Barbara Pfenniger, responsable alimentation de la fédération romande des consommateurs en témoigne également : «Il existe une réelle volonté de contrôler son alimentation. Il y a trop d’industrialisation, les gens en ont marre et veulent connaître la provenance de leurs aliments. Il est difficile de calculer la hausse des produits vegans étant donné que cela représente majoritairement des fruits et des légumes, toutefois une baisse considérable de la consommation de viande se ressent». Plusieurs restaurations se spécialisent dans cette nouvelle cuisine comme le Véganopolis café que l’on peut retrouver du côté de Lausanne. Une épicerie dotée d’une bibliothèque dédiée aux luttes sociales… avec une spécialisation pour les droits des animaux. On peut également y découvrir un comptoir où sont proposés des mets à emporter dans des emballages 100% compostables et biodégradables. Y sont mêmes disponibles «des préservatifs vegans sans lactose pour les plus gourmands», précise Mehdi Salhi, co-fondateur de l’endroit.
 

« Ce n’est pas une tendance mais une prise de conscience collective »

Aryna, jeune Glandoise étudiante en 3e année de philosophie explique ce qui l’a poussée à adopter ce mode de vie: «j’ai découvert les tortures infligées aux animaux sur internet. J’estime que nous ne sommes personne pour exploiter la vie animale. Après un voyage en Inde où près de 35% de la population est végétarienne, je suis d’abord devenue végétarienne, et ensuite vegan». Une situation qui est plus simple à vivre aujourd’hui qu’il y a trois ans. «Les grandes enseignes proposent davantage de produits vegans, l’émergence d’un nouveau marché est bel et bien là. Il existe de plus en plus de restaurants adaptés à la demande».
Un peu plus tard dans la conversation, à la question, le veganisme serait-il qu’un effet de mode? La réponse d’Aryna est sans appel: «ce n’est pas une tendance mais une prise de conscience collective d’une société qui évolue. Je ne désire pas imposer mes idées à mon entourage, mais si j’arrive à en influencer un ou deux, c’est toujours une victoire personnelle», déclare-t-elle.

 

« L’alimentation a besoin d’être riche et variée »

«En tant que nutritionniste, il m’est difficile de cautionner le véganisme. L’alimentation de l’homme a besoin d’être variée. Les repas doivent être riches en protéines et vitamines qu’on ne retrouve pas toujours dans les végétaux. Le vegan se met tout seul dans une situation de carence. Les insectes sont une bonne alternative aux bovins par exemple, mais avec le véganisme on atteint un radicalisme extrême », estime le nutritionniste Valerio Rizzo. En effet, bien que bannir la viande de son alimentation serait bénéfique pour la santé, il subsiste certains risques pour les véganes. Le principal : les carences en vitamine B12. « Elle est produite par l’homme mais il ne peut pas la réabsorber. On la retrouve chez les animaux. Aujourd’hui, on sait que le seul moyen de s’en procurer pour un vegan est la version supplémentée. Elle est proposée en pharmacie, sous forme de cachets, d’ampoules buvables ou intramusculaires, et de sprays pour les enfants », ajoute la nutritionniste.
 

Léa Presgurwic


L’Ecole de Iournalisme et de Communication de Genève

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