Durant l’automne 2015, vous êtes partie vous immerger sur l’ile de Leros pendant un mois. Quelles motivations vous ont poussé à partir sur cette île ?
Je suis partie en indépendante avec le photographe Pierre-Emmanuel Fehr afin de pouvoir rendre compte de la réalité de cette petite île au paysage idyllique, par laquelle transitent chaque jour des milliers de migrants. Je voulais aller à la rencontre de ces personnes et leur accorder la place qu’elles méritent. Arrêter de parler de cette crise migratoire en terme de chiffres et de statistiques. Je pense que nous vivons une scène historique sur le plan humanitaire, et qu’il est fondamental de replacer l’humain au centre.
Quelle a été votre première impression à votre arrivée sur l’île ?
Ce qui m’a choquée lors de ma première journée, c’est l’absence totale de migrants. Il y a en avait 5'000 la semaine d’avant, et là plus rien. Le deuxième jour, des centaines sont arrivés à nouveau depuis la Turquie. C’est cette interrogation qui a été à la base de mon enquête. On parle sans cesse « d’afflux massifs » de « flux incontrôlables », mais c’est une image faussée. En réalité les gouvernements arrivent très bien à gérer ces mouvements de population quand des intérêts entrent en jeu.
D’autres choses vous ont-elles choquées ?
La surprise de voir que tous les migrants avaient des papiers syriens ! C’était pendant la période où l’Allemagne avait ouvert grand ces frontières aux réfugiés de ces pays. Une fois, j’ai pu voir que des Libanais qui fuyaient une situation de persécution avérée, et qui se sont présenté sans dissimuler leur nationalité. On ne les a pas laissés entrer sur l’île.
Était-il facile d’entrer en contact avec les migrants ?
Relativement avec les hommes. Avant d’arriver sur l’île, certains avaient passé trois jours sans manger ni dormir et avaient besoin de vider leur sac. Il a été cependant beaucoup plus difficile d’entrer en contact avec les femmes. Pour des raisons culturelles, celle-ci ne s’exprimaient jamais librement en présence d’un homme.
Quelle a été votre expérience au sein du camp ?
Je ne me rendais à l’intérieur du camp que deux ou trois heures par jour afin d’arriver à garder du recul et de rester à ma place de journaliste. Ce qui m’a le plus impressionnée, c’est l’état d’esprit des jeunes. C’est avec eux que j’ai vraiment appris ce que signifie la résilience. Ils ont un telle force de vivre, d’aller de l’avant. Je me souviendrai toujours de ce que l’un d’entre eux m’a dit : « Si aujourd’hui je suis dans un camp avec trois biscuits en poche, demain je serai médecin en Allemagne ».
Vous sentiez-vous en décalage lorsque vous êtes rentrée en Suisse ?
Oui, comme à chaque fois que je rentre. Les gens n’ont pas l’espace pour accueillir votre témoignage, vos histoires. Mais ça fait maintenant 15 ans que je voyage et je m’y suis habituée. Et même si j’aime profondément le voyage, je suis aussi attaché à mon quotidien en Suisse.
Je suis partie en indépendante avec le photographe Pierre-Emmanuel Fehr afin de pouvoir rendre compte de la réalité de cette petite île au paysage idyllique, par laquelle transitent chaque jour des milliers de migrants. Je voulais aller à la rencontre de ces personnes et leur accorder la place qu’elles méritent. Arrêter de parler de cette crise migratoire en terme de chiffres et de statistiques. Je pense que nous vivons une scène historique sur le plan humanitaire, et qu’il est fondamental de replacer l’humain au centre.
Quelle a été votre première impression à votre arrivée sur l’île ?
Ce qui m’a choquée lors de ma première journée, c’est l’absence totale de migrants. Il y a en avait 5'000 la semaine d’avant, et là plus rien. Le deuxième jour, des centaines sont arrivés à nouveau depuis la Turquie. C’est cette interrogation qui a été à la base de mon enquête. On parle sans cesse « d’afflux massifs » de « flux incontrôlables », mais c’est une image faussée. En réalité les gouvernements arrivent très bien à gérer ces mouvements de population quand des intérêts entrent en jeu.
D’autres choses vous ont-elles choquées ?
La surprise de voir que tous les migrants avaient des papiers syriens ! C’était pendant la période où l’Allemagne avait ouvert grand ces frontières aux réfugiés de ces pays. Une fois, j’ai pu voir que des Libanais qui fuyaient une situation de persécution avérée, et qui se sont présenté sans dissimuler leur nationalité. On ne les a pas laissés entrer sur l’île.
Était-il facile d’entrer en contact avec les migrants ?
Relativement avec les hommes. Avant d’arriver sur l’île, certains avaient passé trois jours sans manger ni dormir et avaient besoin de vider leur sac. Il a été cependant beaucoup plus difficile d’entrer en contact avec les femmes. Pour des raisons culturelles, celle-ci ne s’exprimaient jamais librement en présence d’un homme.
Quelle a été votre expérience au sein du camp ?
Je ne me rendais à l’intérieur du camp que deux ou trois heures par jour afin d’arriver à garder du recul et de rester à ma place de journaliste. Ce qui m’a le plus impressionnée, c’est l’état d’esprit des jeunes. C’est avec eux que j’ai vraiment appris ce que signifie la résilience. Ils ont un telle force de vivre, d’aller de l’avant. Je me souviendrai toujours de ce que l’un d’entre eux m’a dit : « Si aujourd’hui je suis dans un camp avec trois biscuits en poche, demain je serai médecin en Allemagne ».
Vous sentiez-vous en décalage lorsque vous êtes rentrée en Suisse ?
Oui, comme à chaque fois que je rentre. Les gens n’ont pas l’espace pour accueillir votre témoignage, vos histoires. Mais ça fait maintenant 15 ans que je voyage et je m’y suis habituée. Et même si j’aime profondément le voyage, je suis aussi attaché à mon quotidien en Suisse.