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« L’apprentissage du français est dans une impasse»

Mercredi 5 Mars 2014

Le parlement du canton de Nidwald a soutenu à l’unanimité un postulat de deux députés de l’UDC qui demandent à ce que le français soit supprimé à l’école primaire.


Le professeur Peter Hänni, directeur de l’Institut de fédéralisme à l’Université de Fribourg, répond à nos questions.

Propos recueillis par Catherine Bellaïde, le 3 mars 2014

« L’apprentissage du français est dans une impasse»
En supprimant le français à l’école primaire, les Suisses alémaniques ne mettent-ils pas ainsi en danger le fédéralisme suisse ?

Dans l’immédiat, aucun indice ne permet de dire véritablement que cette situation mette en danger le fédéralisme suisse. Mais la Conférence des directeurs de l’instruction publique de Suisse alémanique censée s’occuper de cette question, sur laquelle on discute depuis relativement longtemps, traîne depuis un certain temps déjà, et n’est pas capable de trouver un consensus. Les différents cantons alémaniques n’arrivent pas à se mettre d’accord et font acte de résistance au plan d’enseignement 21.

Qu’est-ce que le plan d’enseignement 21 ?

Le plan d’enseignement 21 est la principale source du problème. Mis en place par les directeurs publics suisses alémaniques, ce plan visait au départ à l’unification et l’harmonisation pour toute la Suisse alémanique des matières à enseigner au primaire. Les cantons n’étant pas capables de se mettre d’accord, ils se retrouvent maintenant dans une impasse.
 
Quand et comment le conflit a-t-il débuté ?

Le conflit sur la question des langues étrangères au primaire a commencé il y a déjà dix ans avec le canton d’Appenzell qui avait une préférence pour l’anglais. Comme c’est un petit canton, personne ne s’en est inquiété. Mais après Appenzell, c’est Zurich qui a souhaité supprimer le français. Par la suite, sous prétexte de subir trop de pression, chaque canton a voulu faire comme il voulait. La Berne fédérale, quant à elle, continue encore à maintenir l’idée que l’on doit garder le français comme langue étrangère.
 
Pourquoi devoir choisir entre deux langues ?

Certains enseignants disent que deux langues étrangères c’est trop pour des enfants de cet âge. Si cela dépasse les capacités intellectuelles des élèves et qu’il faillait choisir entre le français et l’anglais, c’est l’anglais qui l’emporterait. Ce ne va pas à l’encontre des compatriotes romands, c’est une question de niveau scolaire. A ce propos, on peut dire que les résultats des élèves romands en langues ne sont pas très brillants.
 
C’est pour cette raison que l’apprentissage des langues a été avancé au primaire, alors pourquoi ce retour en arrière en Suisse alémanique ?

En effet, sur le principe vous avez raison, c’est un retour en arrière. Nous nous trouvons dans une véritable impasse, la situation devient assez difficile à gérer, puisque de nombreux enseignants contestent l’apprentissage de deux langues étrangères au primaire et choisissent d’enseigner uniquement l’anglais

Impératif économique

Gilbert Rist, professeur retraité de l’Institut de hautes études internationales et du développement à Genève et professeur à Sciences Po à Paris, explique qu’aujourd’hui, il y a une tendance dans les Universités à parler l’anglais. Tout le monde parle l’anglais. « Ça me désole d’ailleurs, car on devrait pouvoir enseigner et parler la langue du pays dans lequel on se trouve. » En tant qu’enseignant à Sciences Po à Paris, on lui a demandé à ce qu’il donne ses cours en anglais. « En tant que disciple de Claude Hagège (Dictionnaire amoureux des langues),
je considère que plus on a de langues mieux ça vaut. Il faut multiplier les langues et c’est ce que font nos petits romands. En fait, le choix des langues étrangères est lié à un problème économique. En effet, pour pouvoir rentrer dans le marché international, il est préférable de parler la langue de Shakespeare que celle de Molière. En ce qui concerne les alémaniques, ils nous excluent du débat, comme ils l’ont toujours fait avec leur dialecte.
»

Malik Mallem


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