gazette-geneve

L’hippothérapie, un vrai traitement de… cheval

Mercredi 16 Décembre 2015

L’hippothérapie (ou équithérapie) utilise des équidés comme outils de rééducation physique pour les personnes handicapées. Ce soin est peu connu en Suisse et pas remboursé par l’assurance maladie. Edouard Tissot, thérapeute, nous a laissés assister à l’une de ses séances.


Il fait encore nuit à Onex, et seules les illuminations de Noël donnent des couleurs à la ville. Un peu en retrait, le célèbre manège est déjà éveillé. Une cavalière soigne son cheval, le personnel d’écurie herse le sol et nettoie les boxes. Il n’est que sept heures du matin mais Edouard Tissot, hippothérapeute, arrive, un grand sourire aux lèvres, au centre équestre. De son métier et de ses patients, il parlerait des heures. Il a commencé à monter à cheval en 1976. A la même époque, une nouvelle façon de travailler avec le cheval émerge : il s’agit de l’hippothérapie. Aujourd’hui, il réalise une trentaine de thérapies. « Officiellement, ce sont des patients mais je préfère le terme de cavaliers. »
Ce matin, c’est un cavalier particulier qui se présente au manège d’Onex. En effet, les deux hommes se connaissent depuis 40 ans puisqu’ils ont monté à cheval dans ce même endroit. Denis*, aujourd’hui à la retraite, a vu son équilibre se dégrader au fil des ans. Tant et si bien que l’écuyère avec qui il montait a demandé à Edouard Tissot de l’aider. Depuis presque dix ans, les deux hommes se retrouvent hebdomadairement, le temps d’une heure autour du cheval. « Je me sens bien à cheval, raconte Denis. Je reviens toutes les semaines car j’aime ça. » Les séances se suivent mais ne se ressemblent pas. « Son équilibre est plus ou moins bon selon les jours, déclare le thérapeute. Il lui arrive de tomber en entrant dans le tramway par exemple. Cependant, il guide son cheval tout seul. » Le travail qu’ils réalisent ensemble a pour objectif que Denis (pas la peine de répéter l’astérisque) garde une bonne image de lui-même.
Un bon maître d’école
Il est temps de retrouver Figaro, imposant Franche-Comté d’une vingtaine d’années. Denis et l’animal se connaissent depuis le début de sa thérapie. Edouard Tissot le considère comme un bon maître d’école. « Il fait tout ce que l’on veut, du moment qu’on le lui demande correctement. » Le manège d’Onex met à disposition de l’hippothérapeute neuf montures. « Il n’y a pas besoin de dressage particulier, précise-t-il. Il faut des chevaux et des poneys de club qui ont l’habitude des débutants et qui n’ont pas peur des cris et des gesticulations ». Selon Edouard Tissot, cette thérapie fonctionne grâce à l’attrait de l’animal, sa chaleur et son odeur. « A cheval, le cavalier regarde les gens depuis le haut, ce qui le valorise. La monture devient également les jambes de la personne qui ne marche pas. Elle bouge et travaille sans s’en rendre compte. »
La séance ne démarre pas dans le manège mais dans le box de Figaro. Le thérapeute va même plus loin : « En réalité, cela débute quand les personnes se préparent chez elles et se termine quand elles racontent ce qu’elles ont fait. » Les pieds dans la paille, l’odeur enivrante des écuries, la douceur du pelage du cheval… Les sens sont en éveil.
A peine ses grains avalés, Figaro est brossé et sellé par les deux hommes. Ensemble, ils l’emmènent au manège et Denis monte sur son dos à l’aide d’un tabouret. « Je ne suis plus tout jeune, plaisante-t-il. Il faut être souple pour monter sur un cheval ! » Et les voilà partis tranquillement sur la piste.
Un travail physique mais aussi mental
Au pas, Denis réalise des figures de manège (cercles, diagonales, largeurs ou longueurs). Pour travailler son équilibre, il se tient momentanément debout sur ses étriers. Le travail au trot en revanche, le cavalier ne peut plus l’effectuer seul. Le thérapeute doit tenir le demi-trait à la longe sur un cercle. « Nous ne le faisons pas longtemps car c’est fatiguant pour lui, explique-t-il. Même si, aujourd’hui, son équilibre est bon ». Plus qu’un travail physique, il entretient également son mental : l’exercice suivant consiste à énoncer dix figures et à les réaliser ensuite dans le bon ordre, sans en oublier. « Denis a une très bonne mémoire ! » C’est ainsi sans effort qu’il les effectue toutes.
Pour terminer, comme une récompense pour les deux compères, Edouard Tissot demande à Denis de retirer ses étriers. Les jambes tombent le long des flancs du cheval et le cavalier se détend. Dans le même esprit, Figaro comprend vite qu’il peut regagner le centre du manège. Une fois les pieds à terre, le cavalier congratule sa monture, le ramène au box et lui offre des morceaux de pain dur.  Ils se retrouveront quelques semaines plus tard. «
 On ne voit pas toujours l’évolution après la séance
, raconte le thérapeute. Pour certains, le seul progrès qu’ils puissent faire, c’est de rester eux-mêmes. Etre thérapeute est parfois difficile et compliquée en fonction des pathologies en présence. »
* Prénom d’emprunt
 

Lisa Callens


L’Ecole de Iournalisme et de Communication de Genève

Populaire


Vidéos
Actualité
24/01/2018
Etudiants
1 sur 8

Inscription à la newsletter

Partager ce site

Flux RSS


CONTACT

Ecole de journalisme - Genève


www.ecole-journalisme.ch