Jeudi 1er juin dernier s'est déroulée à Onex l'inauguration de la toiture « Nature Echo, un jardin en
toit » sur le toit du bâtiment administratif du DIP (Département de l'Instruction Publique). Ce projet
pédagogique présente la particularité d'être considéré comme un nouveau site vitrine pour le
développement durable et la nature en ville. Mais ce n'est pas le seul toit ce de genre en Suisse.
Alors que la ville de Bâle par exemple a déjà très fortement misé sur ces toitures végétalisées, à
Genève on s'y attelle de plus en plus.
Genève en retard
« Il y a environ une centaine de toits végétaux à Genève, et il y en a à chaque fois plus », explique
Sébastien Polli, gérant d'AlphaGreen, l'une des nombreuses entreprises qui s'occupent de la pose de
ces jardins en toit. Un chiffre qu'il n'est pas possible de préciser pour la ville d'après Philippe
Meylan, chef à la direction du Patrimoine bâti de la Ville de Genève. « Le parc immobilier propriété
de la Ville de Genève est d'environ 800 bâtiments. Cependant, nous ne tenons pas de statistiques sur
le nombre de toitures ni sur leurs surfaces. C'est donc compliqué d'établir le nombre de jardins sur
les toits. Il est alors impossible de comparer leur présence avec les autres villes de Suisse ». En
2013 il n'y avait que 5.7% des toits du canton qui étaient végétalisés selon un inventaire de Pro
Natura. D'après les chiffres officiel du canton de Bâle, 25% de leurs toitures sont végétalisées en
2016. Le taux le plus haut de Suisse et du monde. Il y a donc là un retard conséquent à rattraper
pour Genève. « De façon générale les sujets liés aux toitures végétalisées sont du ressort des
propriétaires. Ce qui est sûr ce qu'à la Ville de Genève, nous nous posons toujours la question de la
capacité de la toiture à supporter une végétalisation lorsque nous rénovons. Sur des projets neufs
c'est une consigne qui est systématiquement donnée », précise Philippe Meylan.
Selon le gérant d'AlphaGreen, l'existence de ces surfaces vertes ne daterait pas d' hier. « Il existe des
toits végétaux depuis presque 30 ans. Il y en avait sur les toitures de garages ou d'immeubles. Ce
n'est donc pas un phénomène nouveau, mais ça revient peu à peu à la mode ». Selon le gérant il y a,
à Genève, un million de m2 de toitures recouvertes de gravier à végétaliser. Un sacré espace où faire
prospérer ces jardins suspendus.
Pour leur faire voir le jour c'est tout une bataille. Imposer ces toitures végétales pour protéger
l'environnement n'est pas chose aisée. Il faut faire face à un certain nombre de difficultés comme le
fait que les toits ne sont pas prévus pour accueillir de la végétation. Un problème qu'a déjà
rencontré Sébastien Polli. « La plupart des toits peuvent assumer une charge minimale pouvant
supporter une faible couche de gravier. Tandis qu'une toiture végétale standard est beaucoup plus
lourde, ce qui complique son installation ». Un diagnostique qu'approuve Philippe Meylan. « Ces
complications sont généralement présentes lors des dossiers de rénovation, lorsque les toitures
anciennes présentent des limites de charges admissibles et/ou des détails de hauteurs qui ne
permettent pas d'y fixer de la végétation ». L'installation de ces toitures lors des rénovations peut
faire l'objet d'un sérieux surcoût nous apprend le chef du Patrimoine bâti de la Ville de Genève. « Le
surcoût par rapport à une toiture plate conventionnelle se calcule en fonction des projets de
végétations qu'on souhaite installer. Il peut donc varier de quelques dizaines de francs à quelques
centaines de francs au m2. Cette différence économique peut faire renoncer les plus petits
propriétaires à installer de vraies toitures végétalisées ».
Intérêt écologique
Sébastien Polli continue son inventaire des difficultés rencontrées par son entreprise. « L'une des
principales difficultés, c'est de se faire une place sur le marché des toitures végétalisées. Les
entreprises se refilent le boulot entre elles, c'est donc très difficile d'entrer dans le réseau. Les
industries qui s'occupent de l'isolation des immeubles sont également celles qui s'occupent du
gravier présent sur presque tous les toits. », affirme le gérant d'AlphaGreen. « Il y a un énorme
potentiel écologique supplanté par les intérêts économiques. Il a été prouvé que les toitures
végétales diminuent l'écart de températures sur les toits et qu'ils réduisent les phénomènes de
vieillissements des immeubles. Seulement s'ils durent plus longtemps il y a moins de travail pour
ceux qui fabriquent les toitures ». L'irrigation est également un autre problème rencontré par les
entreprises. « Souvent il n'y a pas d'eau sur les toits, donc lors des périodes de sécheresses les
plantes ne sont pas irriguées et comme elles ne repoussent pas, elles disparaissent. Un système de
récupération des eaux de pluie avec des panneaux solaires est en train d'être mis en place afin de
remédier à ce problème », indique-t-il. Un bienfait pour l'environnement que confirme Philippe
Meylan. « Les avantages écologiques pour la gestion des eaux de pluie sont fondamentaux. Moins
on retarde leur évacuation, moins il y a de surcharge sur les réseaux d'eaux usées. Une meilleure
inertie thermique des bâtiments est également à prendre en compte et, tout simplement, ces jardins
sont un complément à la biodiversité de la ville de Genève ».
Vision future
En retard par rapport à d'autres villes de Suisse, le marché des toitures végétales se développe de
plus en plus. D'après Sébastien Polli, si ces toits sont aujourd'hui relativement peu présents ils
seront bientôt légion à Genève. « Aujourd'hui leur présence est plutôt anecdotique, mais je suis
convaincu que cela deviendra la norme d'ici peu de temps. En tout cas, la demande pour
l'installation de ces toits existe bel et bien ». Un constat partagé par Philippe Meylan qui souhaite,
dans le futur, développer la présence de plantes demandant peu d'entretien. « De manière générale
nous étudions systématiquement les solutions pour accentuer la présence de ces toits dans notre
ville. Le plus souvent on recherche des végétations extensives qui n'ont besoin que de très peu de
soins, ce qui n'est pas toujours facile à trouver ». Une perspective qui présage un futur radieux à ces
jardins en toits. D'ici quelques années Genève verra la vie en vert.