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Dérives et débats médiatiques : comment sauver la situation ?

Dimanche 27 Février 2022

Que peuvent ou doivent faire les journalistes pour ramener de la sérénité, de la crédibilité et de la substance aux débats actuels marqués par les outrances et les punchlines?


Insultes à tout va, punchlines plus piquantes les unes que les autres, une cacophonie incontrôlée, voilà ce qui ressort des observations des débats actuellement  programmés sur des chaînes de télévisions, de radios ou encore dans la presse écrite. La violence, la virulence des propos, lagressivité avec laquelle des participants assoient leur propre vérité sont des phénomènes de plus en plus perceptibles pour Olivier Christin, professeur en histoire moderne à lUniversité de Neuchâtel et directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études en France. «  On constate que le débat publique ne fonctionne plus comme il le devrait. Que ce soit aux Etats-Unis, en France ou même en Italie, on observe une recherche de bon client à buzz, du clash, bref d’un échange sanglant. » Même si une pareille intensité a déjà existé auparavant, que faudrait -il entreprendre pour apaiser ces dérives journalistiques actuelles ?
Pluralité
Le choix des intervenants et la pluralité de ceux-ci lors des débats organisés par la presse sont deux points primoridaux à prendre en compte, selon Sylvain Bourmeau, professeur associé à l’École des hautes études en sciences sociales et directeur du journal AOC. Il relève : « Ne pas inviter nimporte qui fait partie de notre travail de journaliste. Dans le cas de débats scientifiques, donner la parole à des scientifiques incompétents entrave le débat. Ce nest plus une question d’échange dopinions si le choix des intervenants ne rentre pas dans un processus journalistique de se rapprocher de la vérité. »
Même discours concernant une redondance dans le choix de personnes retenues pour débattre, souvent expertes en matière de communication, et que lon peut voir à longueur de temps sur les plateaux de télévision. Esther Mamarbachi, cheffe de la rubrique politique à la RTS et ex-productrice dInfrarouge appelle également à diversifier les intervenants. Même si elle assume inviter de « bons clients » qui attirent lattention par leurs punchlines aiguisées et sont donc « vendeurs », « il reste nécessaire de faire venir une pluralité de personnes différentes, dautant plus celles qui ont déserté ces débats comme les universitaires ou les femmes en Suisse. Cest un effort que nous devons tous faire. »
L’éducation au centre de ce changement 
Ce changement, cet effort, il est primordial de lenseigner aux futurs professionnels des médias. Selon nombre dexperts, les écoles de journalisme francophones prennent en tout cas cette direction. « Nous apprenons à nos élèves à réfléchir à qui donner la parole. Aux institutions, aux politiques ou daller chercher plus loin dautres sources » souligne Annik Dubied, professeure ordinaire à lAcadémie du journalisme et des médias de Neuchâtel. Autre enseignement primordial pour Florian Tixier, professeur à lInstitut de Journalisme Bordeaux Aquitaine : apprendre à se défaire des canons journalistiques, à les faire évoluer.
Ainsi, un phénomène fréquemment observé par nombre d'observateurs  est la tendance à choisir  deux personnalités diamétralement opposées pour provoquer laffrontement dopinions. Des débats généralement stériles et agressifs et qui permettent au journaliste de créer du buzz et de ne pas sexposer. « Ce que jenseigne à mes élèves, cest darrêter de se cacher derrière ce procédé et aussi dassumer leur subjectivité pour trouver dautres manières de mener un débat” » explique-t-il.  Apprendre à changer les formats de débats actuels dès l’école pourrait permettre à ces derniers d’évoluer et de peut-être rétablir une certaine sérénité à l’avenir.
 

Fanny Graf


L’Ecole de Iournalisme et de Communication de Genève

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